jeudi 9 juillet 2009

[Grand débat] Que reste-t-il du survival horror?

N.B: article écrit le 16/10/2008

En ces temps troubles ou les banquiers deviennent les premiers fonctionnaires de l'état (bientôt les premières grèves?), où les GameCube se vendent deux-cent cinquante euros et où Sami Nacéri fait du bowling avec des fonctionnaires de police au volant d'une voiture qu'il conduit sans permis, il a paru judicieux de replacer l'église au centre du vilage, ou la mosquée au centre de la cité, c'est selon.

Nouvelle rubrique donc, que vous retrouverez très régulièrement, au gré de l'actualité. Le but est de débattre et de confronter nos points de vue sur des sujets donnés. Une façon ludique pour chacun d'étaler son objectivité, entre gentlemans bien sûr.

Cette semaine, j'ai décidé de faire le point sur l'état du survival horror en 2008.

Loin de moi l'idée de faire l'un des grands manitous du souvenir, le puriste extrême qui vous racontera que le Survival Horror à proprement parler est né (en tout cas sous sa forme caractéristique) avec Alone in the dark, voire même bien avant. Non. Comme beaucoup, je n'ai vraiment apprécié le genre, à défaut de l'avoir découvert, qu'avec l'arrivée d'un certain Resident Evil. Je me revois encore mater des journées entières le trailer fourni à l'époque sur le CD de démos du mag officiel PlayStation.

Mêlant les scènes d'intro et ses acteurs réels avec des morceaux de gameplay comme la terrible arrivée des requins dans le bassin inondé pour finir sur la flippe dans le couloir et son gros-plan sur l'oeil apeuré, c'est le genre de vidéo qui marque définitivement.

A ce moment-là on ne savait pas encore très bien ce que pouvait donner ce genre de jeu mêlé avec la technologie 3D naissante. Au final on se souvient tous la larme à l'œil ou la goutte à la bite de la formidable expérience vécue. C'était sans doute la première fois que le jeu vidéo pouvait procurer de vrais frissons, une vraie angoisse basée sur nos peurs les plus primaires et sur bon nombre de phobies bien connues comme l'enfermement, les araignées ou la survie.

La survie, voilà sans doute ce qu'il y avait de plus marquant dans le jeu, et qui donnait toutes ses lettres de noblesse au genre. La survie ce n'était plus aligner des dizaines d'ennemis que l'on bastonnait jusqu'à la fin du niveau, non c'était plutôt synonyme de gestion minutieuse de son armement et de ses trousses de soin. Choisir d'éviter un zombie plutôt que de gaspiller quelques précieuses balles, ou tenter de se le faire au couteau, voilà de vrais choix cornéliens. Se guérir tout se suite ou tenter d'économiser encore un peu notre spray de premier secours jusqu'au prochain couloir, couloir qu'on ne voyait jamais car une sale rencontre se produisait au détour d'un changement de caméra.

A chaque instant la vigilance et la tension du joueur étaient mises à contribution.

L'horreur quant à elle n'était pas tant graphique que de par l'atmosphère dégagée. Oui les zombies étaient putrides, mais de toutes façons avec cette bouillie de pixels le design ne faisait pas tout. La musique, les bruitages, voilà ce qui a également changé avec le genre. L'atmosphère sonore était à présent primordiale et d'autres plus tard, comme Silent Hill, l'ont bien compris.

Les codes du cinéma de série Z étaient présents: sursauts et thèmes angoissants, une recette maintes fois éprouvée.

Avec un scénario pas trop intellectuel mais suffisamment bien ficelé pour nous donner envie d'aller au bout découvrir le fin mot de l'histoire, le survival horror était donc une mayonnaise difficile à faire prendre tant beaucoup s'y sont cassés les dents.

Pourquoi j'en parle au passé? Parce que le genre est peut-être mort aujourd'hui, ou en tout cas dénaturé.

En se penchant sur le phénomène, on constate que les grandes séries du genre se comptent sur les doigts d'une main: Resident Evil, Silent Hill, Siren, Fatal Frame et le one shot Eternal Darkness.

Est-ce que le genre était propre à une certaine génération, limitée techniquement? C'est la théorie que j'ai envie de développer. Prenons cette fois Silent Hill en exemple. Les limitations techniques de l'époque ont poussé les développeurs à user de ruse pour palier au manque de textures et à la distance d'affichage réduite. Cela a donné naissance au fameux brouillard, marque de fabrique de la série.

Dans le making of de Silent Hill 2, on peut d'ailleurs constater la laideur du jeu sans application de ce filtre.

Le jeu de Konami est réputé pour sa bande sonore, véritable griffe reconnaissable entre mille. Restrictions de gameplay, restriction technique, on apprend à faire avec et on met tout dans l'atmosphère.

Même plus tard, lorsque l'Emotion Engine a permis d'offrir des animations faciales d'une qualité remarquable sur Silent Hill 3, les développeurs sont restés concentrés sur l'essence même du jeu: la peur, l'abandon, l'isolement.

On en arrive au "cas" Resident Evil 4, véritable cas d'école et tournant dans la vie du survival horror.

La technique permettait à présent de gérer plus d'ennemis, dans un environnement 3D, la tentation était grande de révolutionner le genre. Et ils l'ont fait. Resident Evil 4, à proprement parler, est un bon jeu, malheureusement il n'a plus grand chose à voir avec les bases posées.

Munitions à foison, ennemis omniprésents, si la peur est bien présente, ce n'est plus celle de tomber à court de chevrotine ou de tomber nez à nez avec une créature en décomposition au détour d'un couloir.

Code Veronica avait pourtant prouvé qu'on pouvait faire prendre au genre un nouveau tournant esthétique sans pour autant sacrifier les bases.

Ce que je reproche à RE4, c'est d'avoir le cul entre deux chaises: on ne joue pas vraiment à un jeu d'action et pas vraiment à un survival. Du coup il n'est bon ni dans un genre ni dans l'autre.

Tout a été misé sur le gameplay et l'esthétique, au détriment de l'expérience.

Alors évidemment que l'on sursaute, mais on n'a plus vraiment peur, cette peur primaire et viscérale qui fait que l'on a des fois envie de lâcher son pad pour reprendre sa respiration quelques secondes.

Cela resterait un non-événement si Resident Evil 4 n'avait pas entraîné avec lui une autre grande saga: Silent Hill. Les développeurs en manque d'inspiration s'imaginent qu'on a envie de manger des jeux de fusillades à toutes des sauces, comme si nous étions trop primitifs pour apprécier un titre dans lequel on ne rencontrerait personne pendant vingt minutes.

Silent Hill Homecoming a donc ce syndrome du jeu au gameplay qui veut en faire trop et qui finalement dessert l'aventure. L'immersion est réduite à sa plus simple expression (au secours les énigmes et les moments de flippe qu'on sent venir à des kilomètres) et si l'ambiance sonore reste de haute volée, trop d'action finit par tuer la survie.

Parce que dans "survival horror", le "survival" ce n'est pas seulement survivre aux autres, mais aussi à soi-même. Oser progresser dans l'aventure, oser affronter ses peurs.

Aujourd'hui je ne retrouve plus ce formidable sentiment qui m'envahissait lorsque je me laissait happer par une aventure. Je n'ai plus peur et au pire je me fais chier. On ne me donne plus les moyens d'avoir peur, par contre on me donne les moyens de me battre. Je ne veux pas me battre bordel, si je veux me battre je joue à Gears of War ou à un FPS lambda.

Tiens puisqu'on en parle, paradoxalement le meilleur survival de ces dernières années pourrait presque être Bioshock... un comble!

A l'heure où j'écris ces lignes je ne sais encore rien sur Fatal Frame Wii, mais le seul fait de connaître le support choisi me fait craindre également quant à une baisse de qualité de la saga, casualisation du gameplay oblige.

Reste Siren sur PlayStation 3, qui est effectivement un survival fort sympathique, mais très décousu et énervant.

Je m'en serais voulu d'oublier Demento, trop peu connu mais pourtant exceptionnel dans son genre. Dans ce jeu point d'armes ni d'ennemis mais juste une espèce d'immense jeu de cache-cache. Une frêle jeune fille prisonnière d'un inquiétant manoir devait échapper au dangereux congénital qui la traquait. On se cachait sous les lits, dans les armoires, derrière des portes,... Rarement un jeu m'avait fait autant flipper. Une différente forme de terreur, mais toujours basée sur la peur d'être découvert, de se retrouver nu face à l'ennemi.

Dans un autre genre, Rule of Rose a fait les beaux jours de la PlayStation 2, même si à l'arrivée il lui manquait bien trop de qualités pour s'imposer.

Actuellement donc, le genre semble à l'agonie pour ne pas dire éteint. Dire que je regrette les débuts de Resident Evil est un euphémisme. Surtout que Rebirth et Zero ont prouvé qu'on pouvait faire de grands survivals avec la puissance "actuelle". Et puis entre nous je suis un partisan des décors fixes car ils ne prennent pas une ride et leur niveau de détail colle parfaitement avec les besoins du genre.

A quelques jours de la sortie de Dead Space, qui semble prometteur, je suis pessimiste. Si la première approche sur le jeu d'Electronic Arts ne me laisse planer aucun doute quant à la qualité de l'atmosphère, le trop grand nombre d'ennemis aperçus sur les videos mises en ligne me fait craindre le syndrome "Resident Evil dans l'espace". Avec la répétitivité qui va avec.

Pourtant ce n'est pas faute de vouloir perpétuer le genre: Hydrophobia, Alan Wake et Heavy Rain sont déjà dans les starting blocks. Tiens, et si c'était ça l'avenir du Survival: un retour en arrière. En supprimant toute notion de gameplay pour le remplacer par des QTE, Quantic Dream est peut-être en passe de redonner ses lettres de noblesse au genre en se recentrant sur les fondamentaux: ambiance, immersion et peur panique.


Et vous, quel est votre avis? Le Survival Horror actuel vous convient-il ou alors était-ce mieux avant? Que faudrait-il pour renouveler le genre tout en conservant ses forces? Quels sont vos survival favoris?

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